Beiruting.com a eu la cce de faire une interview avec Mme Carmen Chahine Debbané, fondatrice de l'organisation C.L.E.S, et avec la célèbre actrice, Mlle Nathalie Baye.
1. Mme Carmen, en comparaison avec les autres pays, est-ce-que les Libanais sont plus conscients de l'idée des troubles d'apprentissage ?
Carmen : Si on compare aux pays européen, Etats-Unis, Canada ; non je ne dirai pas que nous sommes plus conscients mais nous sommes en train de très bien avancer pour devenir aussi conscients. C.L.E.S a joué un très grand rôle, parce que lorsque nous avons commencé il y a 19 ans, il n'y avait aucune association au Liban qui s'occupait uniquement des troubles d'apprentissage. C.L.E.S s'occupe uniquement des troubles d'apprentissage parce que les élèves ont besoin d'une attention particulière et surtout scolaire. Pendant ces années nous avons contribué à un énorme progrès au Liban.
2. Mlle Nathalie, comment avez-vous entendu parler du travail du C.L.E.S ?
Nathalie : J'ai fait la connaissance de Carmen aux Etats-Unis et un jour nous avons diné ensemble et Carmen m'a parlé de la dyslexie et je lui ai dit que je connais le problème parce que j'étais dyslexique et je le suis beaucoup moins maintenant. Et puis elle m'a parlé du C.L.E.S qu'elle avait fondé et elle m'a demandé si j'accepte l'idée de l'accompagner au Liban pour être témoin de quelqu'un qui a cette difficulté. Et c'est au Liban que j'ai découvert que je suis beaucoup plus dyscalculique que dyslexique. Et j'ai été très heureuse de pouvoir apporter ce témoignage et accompagner Carmen qui fait un travail hallucinant depuis 19 ans. Je pense qu'il y a beaucoup de spécialistes et de thérapeutes qui peuvent apporter, nourrir et aider les personnes avec des troubles. Nous sommes très nombreux et cela rassure beaucoup les parents et les enfants.
3. Quelles sont les majeures difficultés que vous gérer au C.L.E.S et comment ?
Carmen : Les majeures difficultés sont : la dyslexie dont on connait qui est la difficulté d'écrire et de lire, la dyspraxie, difficulté dans l'espace, la dysphasie difficulté d'expression orale, la dyscalculie, difficulté avec les chiffres, la dysorthographie, difficulté d'écriture, l'hyperactivité qu'on connait tous (ADHD), le déficit de mémoire.
Nous avons une équipe multidisciplinaire qui travaille avec les enfants. Nous étions les premiers au Liban à avoir introduire cette notion de travailler en multidisciplinarité. Un psychologue, une psychomotricienne, et une orthophoniste coordonnent tous ensemble les bilans.
4. Mlle Nathalie comment avez-vous pu gérer votre dyslexie ?
Nathalie : j'ai été dans une époque où la dyslexie n'était pas assez connue. Mais j'ai eu la chance d'être dans une école qui était à la pointe de cela. Ils ont tout de suite su que je confondais les « m » et « n », les « p » et « b » ; ils ont détecté une dyslexie et ont prévenu mes parents et leurs ont conseillé de m'amener chez un monsieur qui est devenu ensuite l'un des pontes de la dyslexie en France, M. Claude Chassagny. Donc j'ai eu la chance d'être dans cette école parce que dans d'autres écoles ils m'auront pris pour une mauvaise élève alors que là on m'a fait faire des exercices qui m'ont beaucoup aidée. En général, les enfants dyslexiques sont toujours différents ; et pour survivre à tout ça déploient d'autres choses qui sont souvent formidables dans l'imagination et dans l'art. Mais surtout ce qui m'a aidé c'est que mes parents ne se sont pas affolés. Ils ont compris que ce n'est pas une maladie, c'est quelque chose avec lequel on peut vivre et s'améliorer avec le temps.
5. Est-ce qu'il existe un période de temps pour qu'un enfant surmonte un trouble d'apprentissage ?
Carmen : c'est un menu à la carte. Donc nous n'avons pas une réponse spécifique mais surement le plus tôt qu'on commence le mieux on évite tous les problèmes psychologiques qui suivent. Le manque de confiance, le repliement sur soi... et tout ce qui va amener au rejet de l'école.
6. Parlant du manque de confiance en soi, est-ce que vous avez eu ce problème ?
Nathalie : mes parents étaient assez formidables, ils ne se sont pas affolés parce que j'étais une mauvaise élève. Ils m'ont toujours fait confiance et c'est le plus beau cadeau qu'on puisse faire à un enfant parce que si mes parents m'avaient engueulé que tu es mauvaise et paresseuse, j'aurai perdu toute confiance en moi. J'ai des parents qui sont des artistes et qui sont uniques.
7. Est-ce qu'on peut savoir plus de détails à propos des « Classes du Support Scolaire» ?
Carmen : Les classes de support scolaire ou Learning Support, sont des classes qu'on a ouvertes en collaboration avec le ministère de l'éducation au Liban. Les centre de C.L.E.S sont pendant l'après-midi, alors que les classes de support sont des classes ouvertes dans l'école même. L'élève sort de la classe seulement durant la période dont il a une difficulté avec la matière. Et il y a une grande collaboration entre les profs de la classe ordinaire et les profs de la classe du support. Ces derniers sont entrainés par nous et prennent des enfants dans des petits groupes pour qu'ils puissent leur donner l'attention nécessaire.
8. C'est quoi votre contribution avec C.L.E.S ?
Nathalie : Ma contribution est de pouvoir accompagner Carmen et si mon témoignage peut apporter un petit quelque chose en plus, je le fais vraiment volontiers. Parce que le travail de Carmen et du C.L.E.S est rare et certainement merveilleux. Les enfants ayant un trouble d'apprentissage au Liban sont chanceux parce qu'ils ont une bonne infrastructure. Il y a des enfants dont les parents ont les moyens de payer un thérapeute ou un psychologue, mais il y en a d'autre qui ne sont pas capables. Savoir que C.L.E.S est gratuite pour tous les enfants qui peuvent tout simplement s'envoler parce que nous les avons aidés à surmonter cette difficulté, est un cadeau fantastique. Une très importante chose que j'ai envie de mentionner que les enfants DYS ont des trésors en eux. Parce que si on bute avec les chiffres ou avec les lettres, on développe à côté autre chose. Donc en général ce sont des enfants qui ont des talents qui vont surgir pour compenser le manque qu'ils ont par ailleurs.
Carmen : Moi aussi je vais répondre à cette question et dire que la contribution de Nathalie Baye est excellente. A part de sa grande générosité de cœur, elle encourage les personnalités et les gens, à parler de leur difficulté. Parce que c'est comme ça qu'on devient un « Role Model » à suivre.
9. Est-ce que vous avez trouvez une solution pour les examens officiels ?
Carmen : le ministère a instauré des méthodes de dispenses ou de compensation. Depuis quelques années le ministère a commencé à faire passer aux élèves des examens autrement.
Le ministère envoi au C.L.E.S. les enfants qui doivent subir un dernier bilan avant le brevet mais c'est le ministère qui décide si l'enfant doit être dispensé ou s'il peut effectuer l'examen normalement.
Pour certain enfants ayant un dysfonctionnement, il y a des méthodes spécifiques pour passer un examen. Par exemple un enfant dyslexique aura besoin de plus de temps pour pouvoir lire les questions et essayer de répondre. Pour un enfant hyperactif, il faut diviser la question. Si une certaine question exige que l'élève doive faire plusieurs choses, un enfant hyperactif ne va pas pouvoir les faire. Il va y oublier, et c'est pour cela qu'on doit diviser la question en plusieurs autres.
10. Quelle est votre message pour les enfants ayant des problèmes de DYS ?
Nathalie : Mon message c'est de jamais douter d'eux, de ne jamais perdre la confiance, et de développer toute leur imagination et de se diriger vers des spécialistes.